Qu’est-ce que la charge bidirectionnelle ?

La charge bidirectionnelle permet à une voiture électrique (VE) de recevoir de l’énergie depuis le réseau ou une installation photovoltaïque pour ensuite la renvoyer vers la maison (V2H — Vehicle-to-Home) ou vers le réseau/gestionnaire (V2G — Vehicle-to-Grid). Techniquement, le besoin se limite à un véhicule électrique compatible, une borne de recharge bidirectionnelle (avec gestionnaire d’énergie intégrée) et des échanges d’information sécurisés entre le véhicule électrique et la borne (autour de protocoles de communication tels que ISO 15118-20 qui émergent autour de la norme CCS – Combined Charging System).

Marques et véhicules d’ores et déjà compatibles V2G

Remarque : la compatibilité évolue vite, ci-dessous une liste non exhaustive des principales marques et modèles.

Véhicules confirmés ou déjà utilisés en projets

  • Nissan LEAF : historique V2G (CHAdeMO*) — Nissan a approuvé des chargeurs bidirectionnels (Fermata FE-20) pour le Leaf ; Nissan annonce aussi capacité V2G pour la nouvelle Leaf en Europe.
  • Renault / Mobilize (R5 E-Tech, flotte car-sharing) : déploiements V2G en production avec MyWheels à Utrecht (projet de centaines de véhicules).
  • Ford F-150 Lightning (USA) : fonctionnalité « Home Backup Power » / Intelligent Backup Power (V2H) commercialisée aux États-Unis.
  • GM (Chevrolet Silverado EV, Cadillac Lyriq, etc.) : suite GM Energy V2H / PowerShift annoncée pour certains modèles et marchés US.

Véhicules avec fonctionnalités proches (V2L / annoncés pour V2H)

  • Hyundai Ioniq 5, Kia EV6, BYD Atto 3 : largement équipés en V2L (prise/extraction de courant pour appareils) ; certains constructeurs testent ou préparent le V2G/V2H.

CHAdeMO* est un protocole massivement déployé pour des solutions V2G (notamment au Japon) Il est progressivement remplacé par ISO 15118-20, compatible CCS (pour l’Europe).

Et coté bornes, lesquelles sont compatibles V2H ou V2G ?

Remarque : comme pour les véhicules, le nombre de références de bornes compatibles ne cesse d’augmenter. Ci-dessous, une liste non exhaustive.

  • Wallbox — Quasar 2 : borne bidirectionnelle AC destinée au marché résidentiel / V2H & V2G (gestion production solaire intégrée, fonctions « backup »).
  • Fermata Energy — FE-20 : bidirectional DC charger (CHAdeMO) approuvé par Nissan pour LEAF ; ciblage flottes / usages V2B/V2G.
  • Enphase : propose une solution bidirectionnelle pour les marchés où les véhicules et protocoles sont compatibles (ISO 15118 requis côté véhicule).

Le V2H ou V2G est-il déjà une réalité ?

Alors oui, les déploiements de projets pilotes et projets opérationnels de tailles plus conséquentes se multiplient depuis quelques années. Plusieurs pays mènent ainsi des déploiements à l’échelle municipale ou nationale.

  • Pays-Bas (Utrecht) : projet large avec MyWheels + Renault + We Drive Solar — déploiement V2G pour flottes/car-sharing (50 → 500 véhicules programmés). Utrecht est cité comme « premier grand déploiement européen ».
  • Japon : forte installation de bornes CHAdeMO bidirectionnelles (retour d’expérience et déploiements massifs historiques).
  • États-Unis : projets commerciaux et offres (Sunrun / Ford pour gestion V2H en grid services; GM Energy solutions). Plusieurs pilotes commerciaux (Sunrun, Fermata Energy, GM Energy) sont en activité.
  • Autres tests / démos : entreprises et villes Européennes se projettent également (Suède, Danemark, Pays-Bas, France, Espagne) avec des projets pilotes et l’annonce de premières offres.

Quels sont les freins à un déploiement massif du V2G ou V2H ?

Comme pour toute technologie émergente, les freins à son adoption sont nombreux. Si la technologie semble mature, les aspects normatifs, réglementaires, économiques et financiers restent au cœur des enjeux de son adoption.

  1. Normes & interopérabilité : fragmentation (CHAdeMO vs. CCS + ISO 15118-20 en émergence). Tant que CCS/ISO15118-20 ne sera pas universelle, l’interopérabilité reste un obstacle. Un enjeu qui n’est pas sans rappeler les difficultés rencontrées dans le secteur IoT il y a quelques années.
  2. Réglementation & approbation des gestionnaires/gestionnaires de réseau (DSO/Enedis) : injecter dans le réseau ou opérer en marché de flexibilité nécessite des accords, contrats et homologations locales.
  3. Modèle économique & agrégation : évolution du marché de l’électricité et de la place du distributeur dans un marché où l’autoconsommation (résidentielle) deviendra la norme.
  4. Coût & complexité des bornes bidirectionnelles : bornes et intégration (Power Recovery Unit, commutation, compteur additionnel) sont plus onéreux que les bornes dites classiques. Le ROI dépendra essentiellement du marché et du positionnement prix.
  5. Préoccupations batteries / garantie : coté technique, la question de l’impact de la dégradation de la batterie et des garanties constructeurs reste centrale et conditionnera largement l’adoption.
  6. Standards IT et cybersécurité : à l’heure où les cyberattaques se multiplient, les enjeux de sécurité IT demeurent centraux. La norme ISO 15118 devra apporter des garanties clairs pour éviter les risques.

Et la France dans tout ça ?

La France est active sur ce sujet mais les projets V2G restent pour une large majorité de simples démonstrateurs. Renault (Mobilize) et ses partenaires ont annoncé avoir lancé plusieurs projets européens (notamment à Utrecht). D’autres expérimentations sur le territoire français via acteurs industriels et énergéticiens se poursuivent également. A l’autre bout de la chaine, les constructeurs automobiles se mobilisent, à l’instar de Nissan, qui a récemment déclaré l’arrivée prochaine d’offres V2G pour la Leaf et Ariya en Europe (à commencer par la France et l’Espagne).

En France, l’injection sur le réseau public et la participation aux marchés d’ajustement implique la coordination avec Enedis, RTE et les fournisseurs (test en cours sur les projets pilotes). En résumé, les barrières existantes sont avant tout administratives et liées à l’adaptation des règles de marché.

Conclusion

A l’heure actuelle, on peut dire que la technologie est opérationnelle et fonctionnelle, en atteste le nombre de projets pilote et les premières offres commerciales (au Japon, aux Pays-Bas, aux États-Unis et en Europe). Son adoption massive dépendra avant tout des pouvoirs publics et de la mise en place d’un cadre réglementaire doublé d’un cadre économique clair. Il est néanmoins fort à parier que le V2G ou V2H sera dans moins de 10 ans la nouvelle norme. L’association V2H / V2G et photovoltaïque donne à voir un futur où l’énergie produite sera utilisée pour les déplacements et pour alimenter le domicile.